Cette fois, on a laissé pour de bon les reliefs derrière nous. La dernière ascension qui se dresse devant le peloton du Tour de France est sans doute la plus stimulante pour ceux qui sont encore en course. C’est la remontée vers Paris ! Dans quarante-huit heures, la caravane défilera sur les Champs. Ce sera alors l’heure des comptes. Ils sont fameux pour certaines équipes, beaucoup moins pour d’autres. Et la dix-huitième étape entre Blagnac (Haute-Garonne) et Brive-la-Gaillarde (Corrèze), longue de 222,5 kilomètres, représente la dernière occasion pour bien des formations de sauver leur Tour. Une victoire d’étape, privilège que s’est accaparé une minorité d’équipes sur cette édition, demeure l’ultime enjeu après lequel chacun va courir toute la journée. Tout du moins ceux qui en ont encore la capacité, car le peloton du Tour est bien fatigué.
Il semble toutefois que la volonté primera sur la capacité aujourd’hui. Le nombre de coureurs candidats à la bonne échappée est inchiffrable. Les premiers coups sont systématiquement rejoints. Trop d’équipes veulent gagner et celles qui ne sont pas représentées dans l’échappée forcent toujours l’allure pour colmater la brèche. Et l’allure, elle est élevée, au rythme de 48,2 kilomètres parcourus dans la première heure. Pourtant, il faudra bien se résoudre à laisser filer une échappée sur les routes midi-pyrénéennes puis limousines. Le mieux est encore d’accorder un bon de sortie à un gros nombre de coureurs issus d’un maximum de formations. C’est ce qui intervient au kilomètre 60. Là, alors qu’aucune échappée n’a pu perdurer jusqu’alors, le peloton laisse partir en plusieurs vagues quelques seize coureurs. Alors que les routes vont se corser après Cahors, voilà de quoi compromettre les chances d’une arrivée massive.
Les seize de tête, présentons-les. Il s’agit d’Adam Hansen et Jelle Vanendert (Lotto-Belisol), Karsten Kroon et Nick Nuyens (Team Saxo Bank-Tinkoff Bank), Michael Albasini (Orica-GreenEdge), Yukiya Arashiro (Team Europcar), Edvald Boasson-Hagen (Team Sky), Kris Boeckmans (Vacansoleil-DCM), Rui-Alberto Faria Da Costa (Movistar Team), Julien Fouchard (Cofidis), Patrick Gretsch (Argos-Shimano), David Millar (Garmin-Sharp), Luca Paolini (Team Katusha), Yaroslav Popovych (RadioShack-Nissan), Jérémy Roy (FDJ-BigMat) et Alexandre Vinokourov (Astana). Un sacré groupe de mercenaires et de coureurs qui ont tout à gagner. La coopération est relativement bonne, mais le peloton ne laissera jamais plus de 3’30 » aux seize échappés. C’est qu’à l’avant du peloton les équipes de sprinteurs n’ont pas renoncé à fondre sur les attaquants.
Mark Cavendish bouche seul le trou sur les échappés, qu’il dépasse comme une fusée.
En tête de ces formations poursuivantes, on trouve le Team Sky. Cette fois il ne s’agit plus seulement pour les Britanniques de défendre le maillot jaune de Bradley Wiggins. D’ailleurs, l’équipe avait décidé au matin de remonter sur Paris à un rythme de croisière, mais les supplications de Mark Cavendish auprès du leader du classement général ont obtenu satisfaction. Le champion du monde, tellement habitué à gagner les années passées (quatre étapes en 2008, six en 2009, cinq en 2010, cinq en 2011), n’en peut plus de ronger son frein. Chez Sky sur ce Tour, il a accepté de ravaler son ambition au profit de son leader Bradley Wiggins. Le Maillot Jaune a conscience des sacrifices consentis par Mark Cavendish. Paris n’est plus loin, ses troupes seront bientôt gratifiées, alors il les expédie en tête de peloton et leur donne l’ordre de ramener les seize attaquants dans le rang avant l’entrée du Tour dans Brive-la-Gaillarde.
Les effets sont immédiats, le rapprochement flagrant. Pour que les hommes de tête aient une chance d’aller au bout, il faut lâcher du lest, et c’est ce que s’attache à faire Alexandre Vinokourov dans la côte de Souillac à 43 kilomètres de l’arrivée. En vain. Il faudra attendre les 20 derniers kilomètres de course pour voir le groupe imploser. Dans la côte de Lissac-sur-Couze à 10 kilomètres de l’arrivée, il ne reste plus devant qu’Alexandre Vinokourov, encore lui, Adam Hansen et Luca Paolini. Mais en dépit de l’insistance de Vino, le peloton continue de gommer son retard dans la bosse, où démarrent à la poursuite du trio de tête Andreas Klöden (RadioShack-Nissan), Nicolas Roche (Ag2r La Mondiale) et Luis-Leon Sanchez (Rabobank). Ces trois-là se greffent aux trois de devant dans la descente, menacés par le retour du peloton.
Mais le final vers Brive, sous quelques gouttes de pluie, est assez périlleux. Les six de tête entrent dans la ville avec une dizaine de secondes d’avance sur le peloton, à la tête duquel se porte bientôt Bradley Wiggins. Le Maillot Jaune, comme il l’avait fait au Cap d’Agde, joue les poisson-pilotes de luxe, avant tout pour échapper aux risques encourus par un peloton lancé à toute vitesse dans des virages à angles droits. L’effort de Wiggins est toutefois insuffisant pour permettre au peloton de rejoindre Roche et Sanchez, les deux derniers réfractaires, en vue du portique d’arrivée. Alors Mark Cavendish démarre. Le Britannique surprend les meilleurs sprinteurs en se lançant seul à la poursuite des deux derniers échappés, qu’il dépasse comme une fusée à 100 mètres de la ligne pour triompher et reprendre confiance en lui, huit jours précisément avant la course en ligne des Jeux, pour laquelle il est cité favori à Londres.
Demain samedi, ce sera le dernier contre-la-montre entre Bonneval et Chartres (53,5 km).
Classement 18ème étape :
1. Mark Cavendish (GBR, Team Sky) les 222,5 km en 4h54’12 » (45,4 km/h)
2. Matthew Goss (AUS, Orica-GreenEdge) m.t.
3. Peter Sagan (SVQ, Liquigas-Cannondale) m.t.
4. Luis-Leon Sanchez (ESP, Rabobank) m.t.
5. Nicolas Roche (IRL, Ag2r La Mondiale) m.t.
6. Tyler Farrar (USA, Garmin-Sharp) m.t.
7. Borut Bozic (SLO, Astana) m.t.
8. Sébastien Hinault (FRA, Ag2r La Mondiale) m.t.
9. Daryl Impey (AFS, Orica-GreenEdge) m.t.
10. Samuel Dumoulin (FRA, Cofidis) m.t.
Classement général :
1. Bradley Wiggins (GBR, Team Sky) en 83h22’18 »
2. Christopher Froome (GBR, Team Sky) à 2’05 »
3. Vincenzo Nibali (ITA, Liquigas-Cannondale) à 2’41 »
4. Jurgen Van Den Broeck (BEL, Lotto-Belisol) à 5’53 »
5. Tejay Van Garderen (USA, BMC Racing Team) à 8’30 »
6. Cadel Evans (AUS, BMC Racing Team) à 9’57 »
7. Haimar Zubeldia (ESP, RadioShack-Nissan) à 10’11 »
8. Pierre Rolland (FRA, Team Europcar) à 10’17 »
9. Janez Brajkovic (SLO, Astana) à 11’00 »
10. Thibaut Pinot (FRA, FDJ-BigMat) à 11’46 »
Classement par points :
1. Peter Sagan (SVQ, Liquigas-Cannondale) 386 pt
2. Andre Greipel (ALL, Lotto-Belisol) 264 pt
3. Matthew Goss (AUS, Orica-GreenEdge) 238 pt
4. Mark Cavendish (GBR, Team Sky) 175 pt
5. Edvald Boasson-Hagen (NOR, Team Sky) 146 pt
6. Bradley Wiggins (GBR, Team Sky) 124 pt
7. Christopher Froome (GBR, Team Sky) 108 pt
8. Cadel Evans (AUS, BMC Racing Team) 100 pt
9. Daryil Impey (AFS, Orica-GreenEdge) 98 pt
10. Sébastien Hinault (FRA, Ag2r La Mondiale) 93 pt
Classement de la montagne :
1. Thomas Voeckler (FRA, Team Europcar) 134 pt
2. Fredrik Kessiakoff (SUE, Astana) 123 pt
3. Chris-Anker Sörensen (DAN, Team Saxo Bank-Tinkoff Bank) 77 pt
4. Pierre Rolland (FRA, Team Europcar) 63 pt
5. Alejandro Valverde (ESP, Movistar Team) 51 pt
6. Christopher Froome (GBR, Team Sky) 48 pt
7. Egoi Martinez (ESP, Euskaltel-Euskadi) 43 pt
8. Thibaut Pinot (FRA, FDJ-BigMat) 40 pt
9. Brice Feillu (FRA, Saur-Sojasun) 38 pt
10. Daniel Martin (IRL, Garmin-Sharp) 34 pt
Classement de la combativité :
1. Alexandre Vinokourov (KAZ, Astana)
Classement des jeunes :
1. Tejay Van Garderen (USA, BMC Racing Team) en 83h30’48 »
2. Thibaut Pinot (FRA, FDJ-BigMat) à 3’16 »
3. Steven Kruijswijk (PBS, Rabobank) à 1h00’50 »
4. Gorka Izaguirre (ESP, Euskaltel-Euskadi) à 1h14’28 »
5. Rein Taaramae (EST, Cofidis) à 1h16’16 »
6. Rafael Valls (ESP, Vacansoleil-DCM) à 1h20’47 »
7. Peter Sagan (SVQ, Liquigas-Cannondale) à 1h24’42 »
8. Dominik Nerz (ALL, Liquigas-Cannondale) à 1h29’28 »
9. Edvald Boasson-Hagen (NOR, Team Sky) à 1h36’16 »
10. Davide Malacarne (ITA, Team Europcar) à 1h41’26 »
Classement par équipes :
1. RadioShack-Nissan (LUX) en 250h23’05 »
2. Team Sky (GBR) à 14’05 »
3. BMC Racing Team (USA) à 36’25 »
4. Astana (KAZ) à 39’20 »
5. Team Europcar (FRA) à 1h04’26 »
6. Liquigas-Cannondale (ITA) à 1h05’27 »
7. Movistar Team (ESP) à 1h08’36 »
8. Team Katusha (RUS) à 1h10’32 »
9. FDJ-BigMat (FRA) à 1h19’40 »
10. Ag2r La Mondiale (FRA) à 1h35’27 »