Mark Cavendish
Mark Cavendish sur le Tour 2021 | © Le Tour
Qui attendait le « Manx Express » en vert sur les Champs-Elysées ? Pas même Patrick Lefévère, le manageur de la Deceuninck Quick-Step, qui avait initialement prévu Sam Bennett sur la Grande Boucle. Incapable de gagner la moindre course sur le sol européen depuis 2016, Mark Cavendish avait même dû engager des sponsors personnels pour assurer son salaire au sein de la formation belge, qui avait accepté de l’engager pour un an. Pari gagnant. Idéalement emmené par le puissant train du « Wolfpack », le britannique a levé les bras dès le mois d’avril à l’occasion du Tour de Turquie, débloquant ainsi son compteur pour enchainer ensuite les succès. 10 en tout cette saison ! Et parmi eux, figurent quatre bouquets acquis sur la Grande Boucle, remontant à la surprise générale au record mythique de Merckx, soit l’ahurissante statistique de 34 victoires sur le Tour. En réussissant ce tour de force, le « Cav » est même allé encore plus loin que la portée de ces succès. Il a dressé la conclusion d’une leçon de persévérance que même ses détracteurs se doivent d’admirer. Critiqué, délaissé voire abandonné, l’homme de l’île de Man a parfois été blessé dans son âme, attaqué dans son orgueil. Mais pour son retour sur la plus grande course du monde, il s’est relevé.
Ethan Hayer
Ethan Hayer lors de sa victoire d’étape sur le Tour d’Algarve | © Tour d’Algarve
On l’avait quitté l’an passé vainqueur du Giro dell’Appennino, acteur majeur des classiques italiennes d’une saison complètement remodelée par la pandémie. Néo-pro au Team INEOS, il avait laissé entrevoir l’étendue de son talent au niveau élite. Il a confirmé cette année qu’il pouvait déjà jouer dans la cour des grands, à seulement 23 ans. Classé d’entrée troisième de chrono de l’Etoile de Bessèges, seulement battu par Filippo Ganna, champion d’Italie, et Benjamin Thomas, champion de France de l’exercice. Et on n’a pas tardé à le retrouver à son avantage dans les vallons de la semaine Coppi et Bartali, où il fut dans tous les coups, dans toutes les roues, remportant notamment le bouquet de la troisième journée. Sa propension à gagner tend ainsi à devenir sa marque de fabrique. Encore victorieux au Tour d’Algarve, en Andalousie, en Norvège ou encore en Grande-Bretagne, le londonien lève les bras partout où il passe, quelque soit le terrain. Sprints, côtes et mêmes montagnes, il peut s’imposer partout, et contre n’importe qui. En Angleterre, à Warrington, il s’est ainsi fait le scalp de Giacomo Nizzolo, Mark Cavendish ou encore Wout Van Aert, récupérant le leadership d’une épreuve dont il ne cèdera le trône au crack belge qu’au terme de l’ultime journée. Et pour couronner le tout, Ethan Hayter fait également preuve d’une incroyable polyvalence, poussant Ed Clancy à le comparer à Sir Bradley Wiggins, faisant notamment allusion à sa propension de passer de la montagne à la piste en rencontrant le même succès. Sa breloque d’argent en Madison aux JO et sa médaille d’or en omnium aux mondiaux le démontrent bien.
Jonas Vingegaard
Jonas Vingegaard fait mal à Tadej Pogacar dans le Ventoux | © Team Jumbo-Visma
On espérait Tadej Pogacar être bousculé par Primoz Roglic ou Richard Carapaz sur le Tour. Il ne le fut que par un frêle danois, au patronyme encore inconnu du grand public au départ de Brest. Jonas Vingegaard. Le coureur de la Jumbo-Visma s’était déjà fait un nom en surprenant tous les favoris du Tour des Emirats-Arabes-Unis à Jebel Jais, ou en remportant la main la semaine Coppi et Bartali. Il s’est fait un prénom en secouant le mont Ventoux, éliminant un par un les favoris de sa roue, jusqu’à en décrocher Tadej Pogacar, réputé imbattable. Ce fait d’arme fut vain mais l’image est restée, en symbole de sa force. 2e à Paris, brillant tant en montagne que contre la montre, le natif d’Hillerslev a amplement dévoilé sa panoplie de coureur de Grands Tours, dessinant les contours de la concurrence qui sera très prochainement opposée à leurs champions. Ses troisièmes places sur les deux chronos ainsi que ses deux deuxièmes places sur le dytique pyrénéen illustrent à merveille ces fantastiques aptitudes, d’autant plus qu’ils ont été acquis sur la plus grande course du monde. Désormais, la Jumbo-Visma sait comment suppléer Primoz Roglic.
Thomas Pidcock
Tom Pidcock s’illustre également en VTT | © Compte Strava de Thomas Pidcock
Au 1er janvier 2021, il n’était même pas encore coureur professionnel, trop occupé à sillonner les champs boueux de la Coupe du Monde de cyclo-cross, sur laquelle il a récolté trois podiums. Trois mois plus tard, il était déjà le leader du Team INEOS sur les ardennaises, remportant sa première victoire professionnelle sur la Flèche Brabançonne et grimpant sur la boîte à l’Amstel. Par ailleurs, il s’est fait la tête de lance de la sélection britannique en VTT comme sur route, glanant la médaille d’or olympique à Tokyo et concluant sa saison par une sixième place à Louvain. Programmé pour briller, Tom Pidcock est déjà accoutumé à la pression du haut de ses 22 ans, endossant le statut de leader depuis sa prime jeunesse. L’an passé, il avait ainsi survolé le Baby Giro, sur la lancée de ses victoires au Tour d’Alsace et sur Paris-Roubaix Espoirs en 2019. Joyau de la couronne, il porte déjà l’Union Jack haut et fort dans le peloton international, prêt à rappeler au peuple britannique les doux souvenirs de la décennie 2010.
Franck Bonnamour
Franck Bonnamour a été élu « super-combatif » du Tour 2021 | © Le Tour
Il est la plus grande surprise de l’année du côté français ! Encore totalement inconnu du grand public au départ du Tour de France, il est devenu en trois semaines le grand baroudeur des Français, leur héros de panache. Dans l’échappée fleuve vers le Creusot, il n’était sûrement pas le nom de plus ronflant, à côté des Van der Poel, Mohoric et autres Van Aert, mais il a parfaitement su tirer son épingle du jeu en restant continuellement au contact des meilleurs pour conclure cette harassante journée à la 6e place. Dès lors, il n’a plus tenu en place. Brillant 5e à Tignes au terme d’une étape lessivante, il a réussi à résister au retour de Tadej Pogacar jusqu’à la ligne. Et lorsque les Pyrénées se sont érigées, il s’est de nouveau envolé, décrochant de beaux tops 10 à Andorre la Vieille et Saint-Gaudens, cumulant les milliers de mètres de dénivelé en échappée sans que cela ne paraisse lui peser. De même, il fut l’un des instigateurs de la grande bagarre du groupe de tête sur la route de Libourne, lançant les hostilités avec velléité dans la principale bosse du final. Et loin de se satisfaire de sa récompense de « super-combatif » du Tour, il a tout fait pour s’en assurer la légitimité. 2e du classement général du Tour de Limousin, 6e de la Bretagne Classic et finalement 2e de Paris-Tours, il s’est imposé en véritable leader de son équipe B&B Hotels KTM. Mieux, son amour de l’attaque et son attache au panache lui ont offert une large sympathie auprès du public français, dont il pourra à l’avenir se nourrir en jalonnant les routes de l’Hexagone en escapade.
Par Jean-Guillaume Langrognet