Trois chutes en trois kilomètres, un amas de coureurs à terre, des gestes d’énervement, des vélos enchevêtrés les uns sur les autres, et au final Alessandro Petacchi qui lève les bras. Les derniers kilomètres de cette première étape du Tour de France ne peuvent que rappeler la chute qui avait impliqué les meilleurs sprinteurs sur le dernier Tour de Suisse. Cette fois-ci pas de chute dans le déroulement du sprint – à l’exception de celle du Cognacais Lloyd Mondory, déjà touché en Suisse – mais des vagues au sein du peloton, des poissons-pilotes déboussolés et une tension palpable. Et comme en Suisse, Petacchi est passé à travers les mailles tendues par les pièges de la route, et comme sur la course helvète, Mark Cavendish a été à l’origine d’un incident.
Pourtant, ce matin au départ de Rotterdam, les coureurs craignaient moins les chutes que de se retrouver prisonniers dans une cassure. La traversée des fameux polders et digues néerlandaises qui façonnent le bord de la mer du Nord, là où la prise au vent est maximum, inquiétait la plupart des coureurs. Les plus faibles redoutaient un coup de bordure d’une équipe décidée à lancer les hostilités dès le départ du Tour. Mais que ce soit Saxo Bank – coutumier du fait –ou l’équipe RadioShack, personne n’est passé à l’offensive. Faute de vent de côté et d’esprit d’initiative, la traversée du bord de mer s’est donc faite sans encombre. Sous un grand soleil et un public venu en masse, seuls trois coureurs mettent le nez à la fenêtre : le Néerlandais Lars Boom (Rabobank), le Belge Martin Wynants (Quick Step), et l’Espagnol Alan Perez (Euskaltel). Une fois sur les routes belges, le scénario reste conforme aux premières étapes des éditions précédentes. Les fuyards sont repris à une trentaine de kilomètres de l’arrivée. Alexandre Pliuschin, le rouleur de la Katusha refuse l’éventualité d’un emballage final. Il s’extirpe du peloton pour contrer. Wynants, agrippé à son guidon serre les dents pour tenir la roue du champion de Moldavie. Incapable de passer des relais, le Belge laisse la majorité du travail au Moldave. Bien que monté à 51″, l’écart ne laissera jamais présager une chance de succès aux deux hommes. A 10 kilomètres de l’arrivée, ils sont avalés par un peloton où règne une agitation inquiétante.
Les Cervélo qui menaient la chasse disparaissent de la tête du peloton. C’est au tour des coureurs de la Columbia de prendre la poursuite en main. Avec le renfort de la Lampre, ils cadenassent le peloton pour empêcher toutes les velléités. Le rythme est effréné, les poissons-pilotes frottent, les sprinteurs s’agitent. A la sortie d’un virage en épingle, un coureur de la Columbia tire tout droit et emmène dans les barrières trois autres coureurs. En un virage, Freire (Rabobank), Hunt (Cervélo) et Cavendish (HTC-Columbia), le responsable du forfait, sont éliminés de la course à la victoire. Quelques centaines de mètres plus loin, après le passage sous la flamme rouge, le peloton s’effondre comme un château de cartes. Une vingtaine de coureurs sont à terre. Le maillot jaune, Fabian Cancellara (Saxo Bank), Lance Armstrong (RadioShack) ou encore Tony Martin (HTC-Columbia) figurent parmi les coureurs impliqués.
La tête du peloton, elle, est passée à travers l’incident. Le solide Brett Lancaster (Cervélo) lance le sprint pour son leader Thor Hushovd (Cervélo) mais c’est Alessandro Petacchi (Lampre-Vini Farnese), qui surgit dans un exercice de sprint long qu’il affectionne tout particulièrement. L’Italien devance Mark Renshaw (HTC-Columbia) sprinteur de substitution de la Columbia et Thor Hushovd (Cervélo). Derrière les coureurs arrivent par petites grappes. Les visages sont marqués, les mâchoires serrées, comme si la plupart condamnaient la folie qui venait de s’emparer d’un peloton, dont la trajectoire dans ses derniers kilomètres de course était semblable, à celle d’un missile sans tête. Petacchi, tout de vert vêtu, a lui le sourire. En 2004, il avait quitté le Tour après une mauvaise chute dans la première semaine. Il n’y était plus revenu depuis. A 36 ans, le Ligurien a vaincu le signe indien.
Classement de l’étape 1 :
1. Alessandro Petacchi (ITA,Lampre-farnese Vini)
2. Mark Renshaw (AUS,HTC-Columbia)
3. Thor Hushovd (NOR, Cervelo TestTeam)
4. Robbie McEwen (AUS,Katusha)
5. Matthieu Ladagnous (FRA, Française des Jeux)
6. Daniel Oss (ITA,Liquigas-Doimo)
7. Jose Joaquin Rojas Gil (ESP, Caisse d’Epargne)
8. Christian Knees (ALL,Team Milram)
9. Ruben Perez Moreno (ESP, Euskaltel – Euskadi)
10.Jurgen Roelandts (BEL, Omega Pharma-Lotto) m.t
Classement complet
Classement général :
1. Fabian Cancellara (SUI, Team Saxo Bank)
2. Tony Martin (ALL, HTC-Columbia) à 10sec.
3. David Millar (GBR, Garmin-Transitions) à 20sec.
4. Lance Armstrong (USA, Team Radio Shack) à 22sec.
5. Geraint Thomas (GBR, Team Sky) à 23sec.
6. Alberto Contador (ESP, Astana) à 27sec.
7. Tyler Farrar (Garmin-Transitions) à 28sec.
8. Levi Leipheimer (USA, Team Radio Shack) à 28sec.
9. Edvald Boassen Hagen (NOR, Team Sky) à 32sec.
10.Linus Gerdemann (ALL, Milram) à 35sec.