Arnaud, on annonçait il y a un an que tu allais moins courir pour garder de la fraicheur. Est-ce que cela a été facile à accepter, de mettre ainsi moins de dossards ?
– Finalement j’ai enlevé juste une course à mon calendrier (Bessèges), après la grosse période sans course ça a été après Roubaix mais finalement ça m’a permis de faire une belle période en début de saison incluant Paris-Nice, Milan San Remo, Gand-Wevelgem, Tour des Flandres et Roubaix.
Tu gagnes une étape du Tour de France en 3ème semaine, le rêve de tout sprinteur. Tu as senti que sur le Tour tu avais justement plus de fraicheur là où c’était le point clé ?
– Plus de fraicheur mentale c’est sûr. Mais également un gros travail en montagne avec toute l’équipe, ce qui m’a permis d’être avec les 3-4 sprinteurs présents sur les Champs. Et ceci a fait la différence pour gagner en 3ème semaine.
© Groupama FDJ
Tu en parles, la fatigue physique est évidemment très présente mais il y a tout ce que nous ne voyons pas à la télévision et notamment une forme de fatigue mentale que vous vivez vous dans le vent, pour remonter, etc. En 3ème semaine, qu’est-ce qui est le plus présent ?
– (Hésitations) La 1ère semaine, on bouffe beaucoup de jus mais physiquement ça va encore. Et la 2ème semaine on tape vraiment dans le physique et enfin la 3ème semaine se fait vraiment au mental – enfin je parle pour mon cas personnel. Voilà un peu comment je ressens les choses sur le Tour. Il savoir bien gérer.
Comment anticiper un Tour de France avec autant d’arrivée au-dessus de 2000 m. Comment cela va-t-il se gérer voire s’anticiper pour un sprinteur, pas pour toi directement puisque tu n’y seras pas ?
– Ceci est réellement à voir au cas par cas. On dit que les sprinteurs ne sont pas faits pour la montagne mais certains organismes réagissent plutôt bien autour de 2000m. Cela reste un sport d’endurance, on fait 5h de vélo avant de faire un sprint à la fin. A la base, nous faisons tous un sport d’endurance, nous avons ces capacités là et il faut garder ça à l’esprit.
Sur l’intersaison 2018-2019, qu’as-tu changé par rapport aux éditions précédentes ?
– Je n’ai pas changé grand-chose, juste un peu plus de « piste intense ». Mais ce n’est pas vraiment déterminant.
Le choix du Giro s’est fait sur quels critères ?
– J’étais à la présentation du Tour et quand j’ai vu le parcours défiler sous mes yeux, j’ai compris que serait compliqué et que je n’avais pas vraiment envie d’y retourner. Ensuite on en parlé avec l’équipe, qui souhaitait se diriger avec Thibaut sur le Tour. Cela m’a finalement simplifié la démarche. Ça aurait été l’inverse, j’aurais été « tendu » de devoir y aller, encore une fois face à ce parcours qui semble très difficile.
Pour compléter un peu garde-robe, le maillot vert par rapport au maillot cyclamen (l’équivalent du maillot vert en Italie), lequel trouves-tu plus beau ?
– A vrai dire, les 2 sont beaux. Mais je préfère quand même le maillot vert du Tour, pour ce qu’il est.
Tu as gagné l’un des Monuments du cyclisme, tu as gagné sur la plus grande course du monde. Que peux-tu encore espérer gagner ?
– Encore plein de choses ! Gagner sur les autres Grands Tours, gagner une belle classique aussi. Par exemple Gand-Wevelgem, une classique autour de laquelle je tourne depuis quelques saisons avec 2ème, 3ème, 5ème, 6ème. C’est une course qui est à ma portée et j’aimerais la remporter. Milan San Remo c’est possible de gagner à nouveau également.
Tu dis Gand-Wevelgem plus facilement que Paris-Roubaix ?
– En effet. Paris-Roubaix va davantage se jouer sur des circonstances de course. « Gand », à la pédale je vais pouvoir répondre présent. A « Roubaix », ça sera plus difficile.
© Groupama FDJ
A l’intersaison l’effectif a légèrement changé, il y a donc le fait d’avoir de nouveaux équipiers. Vous travaillez beaucoup les trains sur les stages, notamment avec les nouveaux gars ?
– Au risque de décevoir, pas forcément en réalité. On ne travaille que peu cet aspect. On va faire 2 journées de train. Après, les gars connaissent leur rôle, l’intensité et la durée qu’ils vont mettre.
L’important est de lire la course. C’est une chose de faire une séance de sprint à l’entrainement tout seul en ligne droite et ça en est une autre, complétement différente, de conduire l’emballage d’un sprint vers l’arrivée quand ça « pousse » de tous les côtés. La concurrence est là pour prendre la place, pour virer à tel endroit plus vite, il faut s’adapter chaque jour au parcours proposé. Finalement, ce sont les 1ères courses qui permettent de poser les bases du rôle de chacun.
A propos de ce rôle de chacun, tu as ton mot à dire sur l’organisation des 3 derniers kilomètres avant la ligne d’arrivée, ou bien cela se fait naturellement ?
– J’ai bien mon mot à dire, on en parle ensemble. Au fil des courses cela devient un mécanisme qui devient bien rôdé et alors il ne faut plus changer. Et le gars va travailler à l’entrainement pour être bon à tel endroit.
La saison a démarré un peu partout : Afrique, Argentine, Océanie, Europe. Tu as regardé du coin de l’œil le comportement des autres sprinteurs ?
– Oui et non. J’ai vu que Viviani et Gaviria sont présents, peut-être le retour de Kittel mais tant que nous ne sommes pas alignés sur les mêmes courses ça ne me touche pas vraiment.
© Groupama FDJ
Quel va être ton programme jusqu’au Giro ?
– Identique à l’année passée. Donc Tour d’Algarve, Het Nieuwsblad, Kuurne, Paris-Nice, Milan San Remo, Grand Prix E3, Gand, Tour des Flandres, Roubaix.
Globalement, vois-tu des sprinteurs au niveau international ou national, émerger cette année ? Comme par exemple ton coéquipier Marc Sarreau.
– Je pense que Marc va passer un cap mais s’il réussit déjà à confirmer son excellente saison 2018, notamment un super Paris-Roubaix où il a été le meilleur de l’équipe et les victoires acquises, ça sera un excellent bilan. Malheureusement, on va les croiser que trop peu pour pouvoir leur donner des conseils. Mais regarder leurs résultats, c’est très facile avec les réseaux sociaux. Et puis, ils ont entamé fort la saison. D’un autre côté, il ne faut pas se voir trop beau et c’est d’ailleurs le rôle du manager de l’équipe, comme par exemple temporiser les ardeurs, ne pas oublier qu’il y a du travail pour éventuellement passer au niveau supérieur. Mais quoi qu’il en soit, c’est un début très encourageant pour eux.