Pour la 10ème édition des Routes du Ventoux, les organisateurs avaient choisi l’ouverture de saison et la mi-avril, plutôt que l’avant-Bosses du 13 en septembre. Bonne ou mauvaise pioche ? D’un côté, on joue la fraîcheur, l’envie de mettre un dossard, l’originalité de la première « cyclo de montagne ». Le Ventoux jusqu’au Chalet-Reynard par Bedoin reste costaud entre Sait-Estève et le chalet, c’est même la partie la plus escarpée du Géant qu’on se coltine. De l’autre, c’est la force de l’habitude, la récurrence de la communication, la moindre rigueur de la météo (quoique…) et la présence des touristes, notamment étrangers, qui composaient entre un quart et un tiers du peloton.
Les sondages étaient eux-mêmes indécis. Bonne idée, mauvaise idée, seule la feuille de présence ou plutôt les bulletins d’engagement allaient parler, non pas le soir à 20 heures, mais dimanche matin au départ à la cave de Villes-sur-Auzon, à 9 heures. Là, 250 coureurs, très chaudement couverts, ont opté pour la visite des contreforts du Ventoux puis, à Sault, l’option gauche avec visite du col de l’Homme Mort et la Drôme, ou le tout à droite avec retour à Villes par Monieux et le 84 kilomètres.
Les abstentionnistes ont donc été plus nombreux que les années passées, et les bouchons sont restés sur la vallée du Rhône ou sur le Côte du Ventoux pour ceux en Liège, mais pas du côté de Villes, Flassan, Mormoiron ou Bedoin. Tant pis, on a failli dire que les absents ont eu raison quand la neige s’est invitée dès Perrâche (à 6 kilomètres du Chalet-Reynard) mais, à l’arrivée, et surtout au moment des remises de prix, après la pasta-party, sous un chaud soleil, tous les coureurs présents se sont régalés même s’ils ont eu froid. Surtout dans la descente vers Sault, physique heureusement. Il faut féliciter tous les coureurs et au moins autant les signaleurs à moto et ceux qui géraient le ravito du Ventoux. Tout le monde avait eu la sagesse d’anticiper et de ne pas ranger les vêtements d’hiver et couvre-chaussures.
Ça parlait donc nettement moins les langues étrangères dans ce peloton de guerriers venu s’offrir une première visite du Géant de Provence. Quantité moindre mais la qualité du plateau était bien là, sans compter la qualité supérieure de tous les participants, ça va de soi ! Coureurs du team Specialized-BV Sport, vainqueur du Raid des Alpilles, acteurs des premiers rôles sur les Boucles du Verdon, coureurs du VTT Garlaban, et tous les noms inconnus ou pas encore connus qui composent le gros des troupes.
Effectivement, dès les premières pentes du Ventoux, après l’intro spéciale et qui va devenir mondialement célèbre du « celui qu’attaque le plus tôt, c’est Raybaud ! », les choses ont été prises en main par un duo qui s’est découvert et qu’on a découvert sur cette 10ème édition. Les Dupond-Durand du Ventoux sont donc Aerts-Durand, non pas Mario d’un côté et Jacky de l’autre mais Brice Aerts et Yann Durand, le coureur de Martigues. Ils vont partir dans un tête-à-tête et creuser les écarts dans la montée mais aussi dans la descente vers Sault où, en se relayant parfaitement sur les 20 kilomètres, ils vont accentuer leur avance. Quatre minutes, c’est bien pour gérer sur un peu plus de 30 kilomètres, quand on en rajoute 50, avec un col, et surtout de longs bouts droits vers Saint-Trinit, ça devient plus aléatoire.
Les deux hommes se séparent en se tapant dans la main, à Sault. Derrière chacun de ces deux coureurs ultra sympas, ce sont des groupes de quatre candidats à la succession en tête qui vont se former.
Sur le parcours de 84 kilomètres, le résultat va vite se faire. Brice Aerts a trop d’avance et les quatre de derrière vont vite se résigner et préparer la tactique du second tour sur le podium, et le sprint au camping de Villes-Sur-Auzon. 2h28’15 », c’est le temps mis par le vainqueur de ces 10èmes Routes du Ventoux. A 4’25 », Jérôme Parrat s’arrache pour devancer Sébastien Calmant, encore un Belge qui aime le Ventoux. Chez les féminines, la reine est Belge également, de Liège exactement, même si elle habite Orange. Betty Kals gagne en 3h08’40 » devant Laure Dewitte et Léa Moussoutéguy du Véloroc Cavaillon.
Sur le 134 kilomètres, le mano a quattro est en place et le scénario pas franchement écrit d’avance. Quatre, puis trois minutes, et encore moins, on n’est pas dans un scénario à la Paris-Roubaix et le quatuor de derrière n’est pas celui des Sky où le ciel du directeur sportif devait être sérieusement encombré. Il y a Cédric Bonnefoy, Luc Javos de l’AVC Aix, Benjamin Delfino du team Scott-Vélo 101-Risoul, rejoints par Nicolas Raybaud, l’homme des départs rapides, revenu au sommet du col de l’Homme Mort pour accompagner son copain du team BV Sport-Specialized et activer encore plus sérieusement la poursuite.
Yann Durand nous l’avouera sur le podium, il ne connaissait pas cette partie du parcours des Routes du Ventoux en Drôme et s’il l’avait eue en tête, il ne serait pas parti dans une si folle aventure. Fin du suspense au bout de 3h53’15 », le temps mis par le roi du solo, soit 2’13 » sur Cédric Bonnefoy qui devance Luc Javos, puis Benjamin Delfino, qui découvrait les longs parcours et qui va s’abonner (!), et Nicolas Raybaud, qui aura encore tenté de filer dans les derniers kilomètres avant d’être repris dans le final. Trop peu de féminines sur le grand parcours où la seule Sylvie Cordes gagne en 4h48’24 ».
Belle journée de vélo qui laissera des souvenirs à tous, c’est certain. Rouler sous les flocons de neige en avril, c’est spécial, mais finir sous un beau soleil, ça réchauffe plus que les organismes. On souhaitera un bon rétablissement à Sébastien Taillardat qui s’est cassé la clavicule dans la descente du Ventoux. 11ème édition en avril ou en septembre ? Bonne question, on en reparlera. Bravo à tous les coureurs et à tous ceux qui ont apporté leur concours à ces Routes du Ventoux 2012.